

Distanciation physique parfaitement respectée autour de Jean-François Paris qui, sur les bancs des prévenus, ne risque pas d’être contaminé par un voisin : il n’en a pas. Depuis l’ouverture du procès Ikea, lundi 22 mars à Versailles, personne ne s’assoit à côté de lui, il traverse les longues journées d’audience en solitaire, sans un mot ni un regard de ses co-prévenus qu’il fait tout, ceci explique cela, pour entraîner dans sa chute.
Jean-François Paris est l’ancien responsable sécurité d’Ikea France (1998-2012). Il était au cœur d’un vaste dispositif de surveillance des salariés, qui a d’abord consisté en des demandes ponctuelles émanant de directeurs de magasins, avant de se transformer au milieu des années 2000, selon ses propres termes, en un « contrôle de masse » des antécédents judiciaires des recrues à chaque nouvelle ouverture – il s’agissait d’éviter d’embaucher d’éventuels agités –, le tout via des officines privées et des policiers arrangeants.
« J’avais conscience qu’on était borderline, et quand l’affaire a éclaté [en 2012], j’ai compris qu’on avait vraiment franchi la ligne et qu’on était dans l’illégalité » : depuis une semaine, comme depuis neuf ans, cet homme de 56 ans assume sa responsabilité, mais il entend bien la partager avec ses anciens collègues qui, eux, l’esquivent.
Alors à l’audience, c’est Jean-François Paris contre tous et tous contre Jean-François Paris, lequel bénéficie paradoxalement du soutien des parties civiles saluant sa « sincérité » face à « ceux qui voudraient que ce soit une affaire Paris et pas une affaire Ikea », comme l’a dit Yassine Yakouti, avocat de plusieurs salariés victimes d’espionnage.
Interrogé par la présidente Angélique Heidsieck, Jean-François Paris a raconté la réunion de crise chez Ikea le jour où Le Canard enchaîné a prévenu qu’il s’apprêtait à dévoiler le pot aux roses. « La com’ de Publicis a dit : “On attend les articles et on niera.” J’ai dit : “On ne pourra pas dire que c’est pas vrai, puisque toute l’entreprise est au courant.” »
« Des recherches sur toutes les embauches »
« Toute l’entreprise », neuf ans plus tard, est représentée par quelques hauts dirigeants figurant parmi les quinze prévenus comme Sylvie Weber, son ex-adjointe à la sécurité, Dariusz Rychert, ex-directeur financier, ou Jean-Louis Baillot, ex-PDG d’Ikea France.
Ouvertement incriminés par Jean-François Paris, ils se sont relayés cette semaine à la barre pour affirmer qu’ils n’avaient rien su, rien fait de mal, ou que s’ils avaient fait quelque chose de mal, c’était au titre de simples exécutants à qui Jean-François Paris avait caché l’odieuse vérité.
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